Né le 19 octobre 1867 à Bussang, fils d’un industriel vosgien, Maurice Pottecher est un brillant élève du collège d’Épinal et devient bachelier à 16 ans. Le jeune homme poursuit des études en droit à Paris et obtient sa licence en 1890.
Journaliste et écrivain, chroniqueur à l’Écho de Paris, Pottecher se trouve au cœur du monde intellectuel parisien. Il développe un goût précoce pour la poésie, publie un recueil de poèmes mélancoliques, mais il est surtout tenté par l’expression théâtrale. En 1892, il fréquente Alphonse Daudet et se lie d’amitié avec de nombreux artistes dont Jules Renard, Romain Rolland, Paul Verlaine, Georges Suarès et Paul Claudel. Il rencontre Camille de Saint-Maurice, actrice réputée de la scène symboliste qui l’initie aux enjeux d’un théâtre d’art à vocation humaniste.
En 1892, à l’occasion du centenaire de la République, c’est à Bussang qu’il pense pouvoir retrouver « le peuple » et fait jouer Le médecin malgré lui de Molière, en confiant l’essentiel de la distribution à des paysans, ouvriers et habitants du village.
Dès lors, Maurice Pottecher se voue à un projet de théâtre populaire et fait construire à Bussang, une grande scène en bois dans une clairière jouxtant la demeure familiale. À 28 ans, il fonde le Théâtre du Peuple, inauguré le 1er septembre 1895. Il a pour ambition d’instruire et de distraire le public en régénérant le théâtre : il est convaincu que l’art doit rassembler tous les citoyens, au-delà de leur diversité sociale et culturelle ; il veut les réunir autour de la devise « par l’Art, pour l’Humanité » et par la nature, d’où l’ouverture du fond de scène.
En 1894, il épouse l’actrice Camille de Saint-Maurice et il crée sa première pièce écrite pour l’occasion, Le diable marchand de goutte (drame rural qui dénonce les méfaits de l’alcoolisme). Deux mille personnes de toutes conditions sociales assistent en plein air à cette unique représentation qui inaugure l’extraordinaire aventure du Théâtre du Peuple.
Après ce premier succès, Pottecher conçoit lui-même le répertoire du théâtre ; de 1895 à 1955, il écrit 31 pièces, jouées chaque été (hormis les années de guerre), rassemblant ainsi comédiens professionnels et amateurs dans ce théâtre unique en France.
Ses pièces seront jouées jusque dans les années 1970 ; dans un souci de renouveau dramaturgique, d’autres auteurs contemporains seront ensuite représentés. Pottecher est aussi l’un des premiers à réfléchir aux horaires des spectacles et à une tarification accessible pour le public le moins aisé.
En 1946, c’est Pierre Richard-Willm (comédien amateur puis professionnel à Bussang), fils spirituel de Maurice Pottecher, qui prend sa suite. Surnommé « Le Padre », Maurice s’éteint le 16 avril 1960 et repose auprès de sa femme, au fond du parc, face au théâtre qu’il a fondé.
Fort de sa longévité, le théâtre populaire de Maurice Pottecher se maintient encore au 21e siècle.
THEATRE
–La Peine de l’esprit, drame philosophique (1891)
–Le Diable marchand de Goutte, pièce populaire en trois actes (1895)
–Chacun cherche son trésor, comédie en trois actes et quatre tableaux (1899)
–L’Héritage, tragédie rustique en prose (1900)
–La Passion de Jeanne d’Arc, drame en cinq actes et sept tableaux (1904)
–Le Château de Hans, pièce légendaire en quatre actes et cinq tableaux (1908) : accéder à des extraits dans Gallica
–Le Philosophe et les athlètes, moralité en un acte (1911)
–L’Anneau de Sakountala, légende dramatique en sept actes d’après Kalidasa, adapté en vers français (1914)
–La Ruche reconstruite, prologue pour la réouverture du Théâtre du Peuple et pour la reprise du Diable marchand de Goutte (1921)
–Le Valet noir, pièce légendaire en cinq actes et sept tableaux (1927)
–L’Allocution interrompue ou Le Miracle de Bussang (1929)
–Le Bourdon de Herrlisheim, légende dramatique en cinq actes (1934)
–Mélusine et son mystère (1948)
–L’Empereur du soleil couchant, pièce légendaire en trois actes et douze tableaux (1955)
POESIE
– L’appel des sirènes : sept poèmes (1930) : accéder à des extraits dans Gallica
-« À la terre lorraine », Le Pays lorrain, mars 1938, p. 140-141
–Les Roses de la Sagesse et autres poèmes (1938)
CONTES, NOUVELLES, ROMAN
–Achille Placidat, l’homme aux lunettes magiques, roman (1925)
–Le Chemin du mensonge, contes et nouvelles (1897)
–La Clairière aux abeilles, roman (1910)
–Les Joyeux Contes de la cigogne d’Alsace (et autres bien honnêtes histoires) (1920)
Le fonds 83 J, Théâtre du Peuple de Bussang, a été déposé par les descendants de l’écrivain en 1992-1993 et 2004. Il compte 272 articles et représente 8,40 mètres linéaires.
On compte 5 parties distinctes pour le dépôt de 1992-1993 :
La première partie est constituée de revues de presse chronologiques. Maurice Pottecher fit collecter par des agences parisiennes les articles évoquant les représentations du Théâtre du Peuple de Bussang ou traitant de manière approfondie la question du théâtre populaire. Ils témoignent de l’aura locale, nationale et internationale de son œuvre théâtrale. L’ensemble, presque complet, couvre la période 1895-1957. Les années de guerre, sauf 1917, sont absentes en raison de la fermeture du théâtre. Une telle documentation est précieuse pour étudier le théâtre populaire dans son contexte social et littéraire, ainsi que l’impact médiatique d’une telle activité puisque sont aussi conservés les textes des émissions radiodiffusées de 1937 et 1938.
La section des activités théâtrales regroupe une série malheureusement incomplète de programmes et d’affiches. Les photographies et les notes, dont certaines sont de la main de Pierre Richard-Willm, permettent de connaître réellement la mise en scène des œuvres de Maurice Pottecher, du vivant de son auteur.
La troisième partie comporte quelques pièces anecdotiques de souvenirs et de documentation, parmi lesquelles on notera en particulier le portrait de Pierre Richard-Willm.
On conserve aussi les écrits de Maurice Pottecher : classé selon leurs formes (manuscrits, tapuscrits ou imprimés), ces documents permettent une approche par genre littéraire : historiques du théâtre de Bussang, œuvres théâtrales, discours, entretiens avec des journalistes et correspondance.
Enfin, une collection de plus de 700 photographies en noir et blanc ou en couleur dont la majeure partie ont appartenu à Germaine Kiener ou Pierre Chan couvre la période 1928-1962 et les années 1980. Elle concerne d’une part l’activité théâtrale à Bussang, d’autre part la vie familiale des troupes successives.
En ce qui concerne le dépôt de 2004, on retrouve la même typologie documentaire, plus récente : des revues de presse (1962-1985), des souvenirs et de la documentation (1890-1957), la programmation des saisons (1938 à 1999) et des photographies (1875-1996). S’ajoutent des documents sur l’historique du bâtiment (1895-1968), l’administration du théâtre (1902-1995), mais aussi des archives relatives à la mise en scène (1948-1995), des partitions musicales qui accompagnent certaines pièces théâtrales (1903-1985), des documents techniques tels qu’une maquette, des projets de décors ou des tableaux de répartition des rôles (1942-1964) et une très belle collection de costumes et accessoires des pièces L’Anneau de Sakountala et L’Empereur du Soleil couchant.
Lien vers d’autres fonds (AD88) :
-Archives contemporaines (après 1940)
-1551 W – Conseil général des Vosges – Division Action culturelle : cassettes vidéo et documentation sur le Théâtre du Peuple de Bussang (1991-1992). 1961 W Conseil général des Vosges – Division Action culturelle : programmation, gestion financière du Théâtre du Peuple de Bussang (1970-1997)
-2195 W Conseil général des Vosges – Division Action culturelle : cassettes vidéo d’une saison de spectacles du théâtre du Peuple de Bussang (1991).
-Archives privées
-266 J – Fonds de l’association du Théâtre du Peuple de Bussang (1953-2005). Il offre un complément naturel au 83 J. Le fonds de l’association du Théâtre du Peuple de Bussang permet au lecteur d’éclairer certains points de l’histoire récente du théâtre (1972-2005) et plus spécialement la fin des années 1990 pour laquelle les dossiers des spectacles ont été conservés (préparation, budget, textes, dossiers et revues de presse, affiches).
-191 J – Fonds Pierre Jeandidier, critique de théâtre et d’opéra (1951-2002) Historique (1975-1976), conseil d’administration (1990), commémorations (1975-1995), classement du bâtiment au titre des MH (1976), direction artistique (1990), portraits de personnalités (1983), programmes et revues de presse des saisons (1951-2002, sauf 1952-1957, 1959-1960, 1962-1970, 1972-1973, 1995, 1998-2000), écrits de Maurice Pottecher (vers 1900-1914) : notes, coupures de presse, photographies, documentation.
-Fonds figurés
-4Fi81 – 31 cartes postales sur le théâtre du Peuple [1900-1950].
-5Fi – 12 affiches sur le Théâtre du Peuple (1910-2010).
-11 Fi – Tirages positifs isolés (format inférieur à 24 x 30 cm) : 11 Fi 70 La Clairière aux abeilles [1934].
-101 Fi – Fonds Pierre Richard-Willm : 101 Fi 1-7 Portraits de l’acteur et décors de la pièce L’Anneau de Sakountala (1930-1937).
-1 Num 53 – Fonds Claude Rosenkrantz : 21 affiches de représentations (1948-1995).
-Journaux et périodiques lorrains JPL 1103 – L’Est Républicain, presse quotidienne régionale JPL 1106 – La Liberté de l’Est, presse quotidienne régionale JPL 1700 – Vosges Matin, presse quotidienne régionale JPL 607 – Bussang, bulletin d’information communal
Fonds numérisé en partie (https://archives.vosges.fr/)
–Théâtre du peuple : https://www.theatredupeuple.com/
-Bussang (Vosges) : square Maurice Pottecher, monument en souvenir au créateur du Théâtre du Peuple, buste en bronze.