Jeanne Philomène Mélin est née en septembre 1877 à Carignan (Ardennes) dans un milieu relativement aisé. Son père, de convictions anticléricales, républicaines, et dreyfusardes dirige la briqueterie familiale. Il a également une approche sociale de l’entreprise, inspirée par Jean-Baptiste André Godin. Durant la guerre de 1870, la maison familiale devint une infirmerie provisoire. Cela marque ses occupants et Jeanne Mélin en entend beaucoup parler.
Cette dernière milite toute sa vie dans les mouvements féministes et pacifistes français et internationaux, tels que « La ligue de la Paix et du Désarmement par les Femmes » et « La Paix par le Droit ». Elle crée en 1912 la section ardennaise de l’Union française pour le suffrage des femmes et en 1931 le « Cercle Pax Orient-Occident ».
Dans un climat de revanche sur l’Allemagne, elle anime des conférences pour la paix, devant des publics essentiellement masculins, dans différentes communes ardennaises : Carignan, Sedan, Rethel, Vrigne-aux-Bois, Donchery. Dans les mêmes années, elle adhère à la SFIO, à la Ligue des droits de l’homme, au comité espérantiste de Sedan, à l’Union pour le suffrage des femmes (UFSF). Pour elle, les femmes sont naturellement pacifistes, ainsi leur reconnaître le droit de vote apporterait une politique plus humaine.
Elle fuit en août 1914 avec ses parents à Dun-sur-Auron (Cher) et y travaille comme bénévole à l’hôpital militaire. En mai 1916, elle crée à Paris une cuisine coopérative des réfugiés qui sert chaque jour des centaines de familles. Elle aimerait également qu’ils bénéficient d’une allocation au logement.
En 1917, elle fonde un Comité d’action suffragiste (CAS) pour l’obtention du droit de vote pour les Françaises dans toutes les élections (droit concédé en 1944). Elle présentera d’ailleurs sa candidature à la présidence de la République française, en 1946, pour l’élection de 1947. C’est alors la première femme à le faire.
La guerre terminée elle prône pour un rapprochement franco-allemand et effectue une tournée de conférences dans les pays scandinaves contre l’occupation française de la Ruhr.
En 1926, elle se consacre à son activité littéraire et reste auprès de sa mère gravement malade, qui décèdera en 1927. Elle est marquée par son divorce en 1934 et le suicide de son frère aîné. Elle se consacre ensuite plus particulièrement à la bibliothèque féministe de Marie-Louise Bouglé.
Durant la Seconde Guerre mondiale, elle se réfugie à Enghien-les-Bains (Val d’Oise) et assiste aux bombardements et à l’invasion allemande. Aveuglée par ses convictions pacifistes, elle accueille favorablement l’entrevue de Montoire et se montre favorable à la collaboration dans ses écrits personnels mais n’en fait pas état publiquement.
Toujours dans un souci pacifiste, en 1959, elle se prononce en faveur du contrôle des naissances et rejoint ainsi l’action d’une nouvelle génération de féministes qui, en 1956, crée le mouvement Maternité heureuse (qui deviendra le planning familial). Elle est cependant complètement marginalisée au sein du mouvement féministe et ne s’intègre pas aux quelques nouveaux groupes militants. Pendant la guerre froide, elle est membre du Mouvement de la Paix et de l’appel de Stockholm, se prononce en faveur de la décolonisation, mais sans militer publiquement, écrivant en revanche beaucoup dans son journal intime. En 1955, à 78 ans, elle revient habiter sa commune natale de Carignan, dans les Ardennes. Le traité de rapprochement franco-allemand de 1963 est pour elle une nouvelle satisfaction, et la concrétisation d’une idée qu’elle avait fortement défendue dans l’entre-deux-guerres. S’éloignant de son anticléricalisme de jeunesse, elle soutient à la fin de sa vie le concile de Vatican II. Elle meurt le 18 avril 1964 à l’hôpital de Sedan (Ardennes).
–Jean, ou À travers la misère, roman ardennois écrit en vers libres (1927)
–Marceline en vacances ou à travers l’amour (1929)
–Lettres à Thalès, 2007.
C’est Jeanne Mélin elle-même qui fit don de ses documents en 1961 et en 1964
Ce fonds (conservé en sous-série 15J) occupe 1,65 mètre linéaire. Il est constitué tout d’abord des archives personnelles et familiales de Jeanne Mélin : manuscrits de ses mémoires, cahiers de poésies lorsqu’elle est au pensionnat Sainte Chrétienne de Carignan, photographies, journaux intimes… Ces archives sont complétées de documents relatifs à son œuvre poétique et romanesque (manuscrits, tapuscrits, correspondance, suivi des ventes…), à ses activités pacifistes et féministes et à ses liens avec diverses associations (programmes de congrès, cartes de membre, compte-rendu de conférences). Le fonds comprend enfin de la documentation : coupures de journaux, brochures sur Carignan, photographies….